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CFTC AIRCELLE
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8 février 2012

Ordinateurs portables, smartphones: un fil à la patte pour les salariés ?

Un salarié équipé d'un smartphone ou d'un ordinateur portable est-il à la disposition de l'employeur qui le lui a fourni ? Doit-il répondre en dehors des heures légales de travail ?

Emmanuel Colombié pour LEntreprise.com, publié le09/11/2010

Aux Etats-Unis, un salarié a déposé une plainte contre son employeur, la ville de Chicago, et réclame le paiement de plus de 500 heures de travail effectuées sur son Blackberry.

Le sujet a été peu traité en France, jusqu'ici... Avec l'explosion des ventes de smartphone, et donc de la proportion de travailleurs équipés et joignables 24 h sur 24, il devrait gagner du terrain. En effet, à l'exception des salariés soumis à l'obligation d'astreinte, cette situation concerne plus d'un actif.

Murielle Cahen, avocate à la cour de Paris et spécialiste du droit des nouvelles technologies, répond à nos questions

Comment appréhender ces nouveaux modes de communication?

- L'utilisation des outils de communication professionnels (e-mail, ordinateurs portables...) pose problème. Pour les smartphones, les forfaits téléphoniques sont souvent pris en charge par les employeurs. Ces derniers demandent "en échange" (bien que ce soit rarement formalisé par écrit) une disponibilité de tous les instants. Joignable tout le temps grâce à son téléphone le salarié moderne ne décroche jamais du boulot. En France, la législation n'est pas claire à ce sujet et il y a encore peu de cas pour faire jurisprudence

Quel est le cadre légal actuel ?

S'agissant du régime des heures de travail supplémentaires, les salariés sont globalement protégés par la loi du 20 août 2008, en vigueur depuis le 22 août 2008. Cette loi a notamment assoupli les conditions de recours aux heures supplémentaires et regroupé, dans un cadre unique, différents dispositifs d'aménagement du temps de travail: modulation du temps de travail, réduction du temps de travail sous forme de jours de repos, travail par cycles... sans toutefois remettre en cause les accords existants.

S'agissant des heures supplémentaires comptabilisées sur un smartphone, s'il existe certaines dérives de la part des employeurs (une manière de mettre la pression qu'il faudrait peut-être encadrer...), la vraie question n'est pas celle du paiement des heures sup mais celle du respect de la vie privée. Il faut donc adapter les règles du management à la vie moderne.

L'utilisation des ces outils à des fins professionnelles est-elle une contrepartie équitable au fait d'être joignable (et donc répondre) à tout moment de la journée et de la nuit ?

De plus en plus d'employeurs procurent à leurs salariés des smartphones de fonction. En échange, les patrons exigent une grande disponibilité des employés et les obligent à travailler, même en dehors des heures de bureau. Contrainte à laquelle refuse de se soumettre nombre de salariés.

La question qui se pose alors est: comment prouver ces heures supplémentaires ?

Exemple: par arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 10 mai 2006, n°04-45378: Mme X. a été engagée en qualité d'assistante en ressources humaines par un CDI, conclu dans le cadre d'un contrat initiative emploi le 3 juillet 2000. Le 24 juillet 2000, la salariée prend acte de la rupture de son contrat de travail pour non-paiement des heures supplémentaires effectuées. L'employeur conteste la demande de paiement d'heures supplémentaires en affirmant que le seul décompte des heures effectuées par Mme X. n'apportait pas d'élément assez précis sur la réalité de ces heures supplémentaires.

Pendant longtemps, il appartenait au salarié qui revendiquait l'exécution d'heures supplémentaires d'en apporter la preuve. Ce système de preuve a été modifié, un partage de la charge de la preuve a été mis en place :

- l'employeur doit fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié

- le salarié doit fournir, à son tour, des éléments à l'appui de sa demande.

Cette neutralisation de la charge de la preuve n'a pourtant pas résisté au changement. En effet, dans le cas présent, la Cour de cassation applique une solution déjà dégagée en 2004 (arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 25 février 2004, n°01-45441). Elle affirme que, même si l'article L. 212-1-1 du Code du travail prévoit que la preuve des heures de travail effectuées ne pèse spécialement ni sur l'employeur, ni sur le salarié, ce dernier doit préalablement fournir au juge des éléments de nature à étayer sa demande. Notons qu'il ne s'agit pas pour le salarié de prouver sa demande, mais d'apporter dès le départ un commencement de preuve.

 

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