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CFTC AIRCELLE
CFTC AIRCELLE
6 mai 2011

Invalidité, inaptitude et visite de reprise

 

Source : Soc. 15 févr. 2011, n° 09-43.172

Nouvelles précisions de la Cour de cassation sur les obligations de l'employeur à l'égard des salariés classés en invalidité pendant un arrêt de travail.

Le 25 janvier dernier, la Cour de cassation a rendu une jurisprudence tout à fait inédite en matière d'inaptitude, dans laquelle elle a fixé de nouvelles règles applicables au cas particulier où un salarié est classé en invalidité pendant un arrêt de travail. En vertu des nouveaux principes posés par la Cour, à partir du moment où le salarié informe son employeur de sa mise en invalidité, ledit employeur doit organiser sans tarder la visite de reprise - sauf si l'intéressé manifeste expressément son désir de rester sans retravailler - sous peine de sanctions (Cass. soc., 25 janv. 2011, n° 09-42.766, Le Pimpec-Mourgue c/ ARAS).

Aujourd'hui, la Cour de cassation franchit une nouvelle étape en précisant que l'employeur peut être condamné même dans le cas où le salarié a passé la visite de reprise, à partir du moment où l'initiative de cette visite était salariale et non patronale. Des sanctions qui ne se limitent pas à une indemnisation du préjudice subi, mais qui peuvent aller jusqu'à une résiliation judiciaire de contrat de travail aux torts de l'employeur.

Les faits : un salarié mis en invalidité organise sa propre visite de reprise

Dans cette affaire, le salarié avait été classé en invalidité 2e catégorie pendant un arrêt maladie de longue durée. Il avait informé son employeur de cette mise en invalidité, puis, à l'issue de son arrêt de travail, il avait pris l'initiative d'organiser sa propre visite de reprise. Le médecin du travail avait rendu un avis concluant à une inaptitude définitive à tout poste.

L'histoire aurait pu s'arrêter là si l'employeur avait tenu compte de la déclaration d'inaptitude et si, à partir de ce moment, il avait cherché à remplir les obligations qui sont normalement les siennes en matière de reclassement. Mais, considérant ne pas avoir été informé en bonne et due forme des démarches du salarié (ce qui avait pour conséquence de lui rendre inopposable l'avis médical d'inaptitude), l'employeur n'avait pas bougé.

Devant cette inertie, le salarié avait agi en justice pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Or, devant la Cour de cassation, le débat a pris une tournure très différente de celle à laquelle les parties au procès pouvaient s'attendre. En effet, ce n'est pas pour défaut de reclassement que l'employeur a été condamné. Il a été sanctionné parce qu'il n'avait pas organisé lui-même la visite de reprise de son salarié.

L'initiative de la visite de reprise incombe exclusivement à l'employeur

Reprenant l'attendu de principe de sa décision du 25 janvier 2011, la Cour de cassation a confirmé que désormais, dans l'hypothèse très particulière où le salarié est classé en invalidité par la Sécurité sociale, l'employeur a l'obligation - draconienne - de faire constater au plus vite l'inaptitude de l'intéressé : « dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester la volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui-ci de prendre l'initiative de faire procéder à une visite de reprise laquelle met fin à la suspension du contrat de travail ». Une obligation qui, dans le cas présent, ne saurait être écartée au motif que le salarié avait, de lui-même, organisé ladite visite de reprise.

Cette décision de la Cour de cassation est tout à fait atypique, car il est depuis longtemps admis que la visite de reprise puisse être organisée par le salarié (il existe en effet toute une construction jurisprudentielle qui prévoit dans quelles conditions le salarié peut lui-même demander à passer cet examen - notamment, s'agissant de la validité de cette visite médicale, qui est essentiellement liée au fait que l'employeur a, ou non, été informé de la procédure activée par le salarié). Mais pour la Cour de cassation, cette jurisprudence « classique » ne vaut plus dès lors que le salarié a été mis en invalidité. Car dans un tel cas, l'obligation de faire passer la visite de reprise incombe à l'employeur - et à lui seul. Le salarié ne saurait donc y suppléer. Pour ledit employeur, les conséquences sont sévères, puisque même si une visite médicale a été passée, il peut être condamné dès lorsqu'il n'en est pas à l'origine.

Remarque : par cette jurisprudence stricte, la Cour de cassation incite les entreprises à agir au plus vite dès qu'un salarié est classé en invalidité, de manière à ce que son sort soit rapidement réglé dans une situation où son état de santé est relativement atteint. Aucune exception à ce principe n'est tolérée. Il est donc exclu que l'employeur puisse s'en remettre au salarié s'agissant des modalités d'organisation de la visite de reprise car ce serait lui permettre d'échapper à ses obligations (dans le cas où le salarié n'aurait pas respecté les obligations d'information à son égard auxquelles il est tenu quand il organise lui-même la procédure de constatation de l'inaptitude).

La sanction peut aller jusqu'à la résiliation du contrat aux torts de l'employeur

Second apport de cette nouvelle jurisprudence de la Cour de cassation : alors que dans sa précédente décision du 25 janvier, la Cour limitait les sanctions applicables à l'employeur en le condamnant seulement à indemniser le salarié du préjudice subi par lui, voilà qu'elle admet aujourd'hui que la carence patronale puisse donner lieu à une résiliation judiciaire du contrat de travail, aux torts patronaux. Une rupture du contrat qui produit les mêmes effets qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse : c'est-à-dire, outre les indemnités de licenciement et de préavis, une indemnisation au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail (au moins égale à 6 mois de salaires). Des sanctions lourdes, donc.

 

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